Les partenaires sociaux, dont l’U2P, ont finalisé, fin février dernier, un projet d’accord national interprofessionnel qui propose notamment un renforcement du compte personnel de formation et de l’accompagnement des salariés, de nouvelles attributions pour les banches et une réorientation des fonds collectés pour la formation professionnelle. Début mars suivant, Muriel Pénicaud a annoncé le contenu de la réforme de la formation, qui s'appuie « largement » dit-elle, sur cet accord… Enfin, le 25 avril, le projet de loi a été présenté en Conseil des ministres. Retour sur quelques mesures-phares de cette réforme qui devrait pouvoir, au moins, simplifier le secteur.
Compte personnel de formation (CPF) en euros et non plus en heures
Tous les salariés verront leur CPF crédités de 500 euros par an, plafonnés à 5 000 euros au bout de 10 ans, auquel pourra s’ajouter un abondement de l’entreprise.
Les personnes sans qualification auront 800 euros, avec un plafonnement à 8 000 euros, afin de leur permettre de changer de catégorie professionnelle.
Le taux de reconversion heures/euros n'a toutefois pas encore été arrêté pour les personnes disposant déjà d'un CPF (5 millions actuellement).
Les salariés à temps partiel auront les mêmes droits que ceux à temps plein, une mesure qui va surtout « bénéficier aux femmes », fait valoir le ministère, « puisque 80 % des salariés à temps partiel sont des femmes et 30 % des femmes sont à temps partiel ».
Le CPF pourra être abondé par les entreprises et les branches, notamment par des accords collectifs ; il est ainsi consolidé comme droit personnel garanti collectivement.
Davantage de droits pour les formations longues
Conformément à l’accord signé par les partenaires sociaux, pour les salariés qui ont un projet de formation longue mais ne disposent pas des crédits suffisants sur leur compte pour le financer, un système d’abondement sera mis en place après validation d’une commission paritaire.
Les abondements des entreprises sur le CPF de leurs salariés seront favorisés par la négociation d’accords collectifs portant notamment sur la qualité de vie au travail.
Formations accessibles via une application
Cette application permettra de s'inscrire et de payer directement une formation, sans passer par un intermédiaire. Elle permettra aussi de connaître ses droits acquis ainsi que l’offre en formations certifiantes dans son bassin d'emploi.
De plus, chacun pourra choisir sa formation en connaissant le taux d’insertion dans l’emploi à l’issue de la formation, le salaire prévisionnel à l’embauche et la différence de coût entre des formations similaires, ou encore choisir sa formation en fonction des commentaires laissés par les anciens salariés et demandeurs d’emploi formés.
L'application sera disponible progressivement à partir de 2019.
Financement
Les entreprises s'acquitteront d'une seule cotisation, au lieu de deux actuellement (1 % formation et taxe d'apprentissage). Mais la contribution totale restera inchangée : à 1,68 % pour les entreprises de plus de 11 salariés et 1,23 % pour celles de moins de 10.
Collecte des fonds
Les sommes destinées à la formation seront désormais collectées par les Urssaf -organismes collecteurs des cotisations sociales-, qui les transféreront à la Caisse des dépôts.
Actuellement, la collecte de la formation professionnelle continue est réalisée par les organismes paritaires collecteurs agréés (Opca), qui seront remplacés -toutefois pas avant 2020 voire 2021…-par des « Opérateurs de compétences », également gérés paritairement.
Ces structures vont notamment financer les centres de formation d'apprentis (CFA), le plan formation des TPE-PME et pourront « co-construire » les diplômes avec les branches « qui le souhaitent ». Il y a actuellement 18 Opca de branches et deux Opca interprofessionnels.
Création de l'agence « France compétences »
Elle remplacera les trois instances nationales actuelles (Copanef, Cnefop et FPSPP) et sera gérée par l'État, les organisations patronales et syndicales, et les régions.
Parmi ses missions, la régulation des prix des formations, afin que les coûts « ne dérivent pas », selon le ministère. Il souligne qu'actuellement, le coût d'une formation en CFA peut varier d'un à six (entre 2 500 et 14 500 euros).
Cette agence régulera aussi la qualité des formations, en définissant un cahier des charges que devront remplir les organismes de formation pour être certifiés, et donc bénéficier d'un financement.
Elle aura deux missions de « péréquation » : une en direction des « opérateurs de compétences » qui n'ont pas suffisamment d'argent pour financer tous les contrats d'alternance, la seconde en direction des TPE-PME.
Modification du Conseil en évolution professionnelle
Conformément à l’accord signé par les partenaires sociaux, un financement spécifique sera dédié à cette structure, actuellement censée accompagner, gratuitement, toute personne qui le souhaite dans son parcours professionnel pour faire le point ou un projet, dont le montant pourrait tourner entre « 200 et 300 millions d'euros », selon le cabinet de la ministre.
Dans chaque région, un opérateur du CEP sera sélectionné par appel d’offres, selon un cahier des charges co-construit entre l’État, les partenaires sociaux et les régions, et bénéficiant d’un financement dédié.
Construction simplifiée du plan de formation
Les entreprises ne seront plus contraintes de construire leur plan de formation en faisant la distinction entre les actions d’adaptation au poste de travail ou liées à l’évolution ou au maintien dans l’emploi dans l’entreprise, les actions de développement des compétences et les périodes de professionnalisation. Toutes les catégories qui complexifient inutilement le plan de formation, seront supprimées.
L’obligation de l’employeur d’assurer l’adaptation des salariés à leur poste de travail et de veiller au maintien de leur employabilité ne change pas.
Formation dans les entreprises de moins de 50 salariés
Les TPE et PME bénéficieront d'une solidarité financière des grandes entreprises pour faciliter l'accès de leurs salariés à la formation professionnelle. Ce système spécial, qualifié par le ministère de « mutualisation asymétrique » consiste en une cotisation versée par l'ensemble des entreprises, mais réservée uniquement au financement des plans formation des entreprises de moins de 50 salariés.
Sources et informations complémentaires :
Dossier de presse « Les 12 mesures-clés de la réforme de la formation professionnelle » du Ministère du Travail ; www.lemonde.fr ; www.cegos.fr/actualites/dossiers-thematiques ; communiqué de presse U2P)