La gestion de l’eau à la parcelle doit être une priorité à la hauteur des économies d’énergie !


Paris, le 27 août 2022

Madame la Première Ministre,

La Chambre nationale de l’artisanat des Travaux publics et du Paysage (CNATP) représente 96 % des entreprises des Travaux publics et du Paysage, entreprises artisanales de moins de 20 salariés qui emploient 97 500 salariés.

La CNATP est membre de l’U2P (Union des Entreprises de Proximité), première force patronale du pays représentant les 2/3 des entreprises françaises.

Nous saluons les dernières déclarations du Président de la République concernant la fin de l’abondance, que ce soit des liquidités, des produits de technologie, des matières premières et notamment de l’eau.

Les entreprises de Travaux Publics agissent dans de nombreuses activités liées à l’environnement, particulièrement dans le domaine de l’assainissement et la récupération de l’eau de pluie.

L’eau est une ressource essentielle, il est indispensable de s’assurer au quotidien d’une qualité et d'une quantité suffisante pour satisfaire nos usages et également pour sauvegarder l’environnement.

Il faut la préserver, la protéger et l’utiliser de façon responsable, l’avenir de notre planète en dépend.

Nos eaux usées nécessitent d’être traitées puis restituées dans le milieu naturel tout en préservant la santé publique et l’environnement. L’assainissement non collectif (ANC), aussi appelé assainissement autonome ou individuel, constitue la solution technique et économique la mieux adaptée en milieu rural. Il concerne les habitations non raccordées à un réseau public de collecte des eaux usées, soit 15 à 20% de la population française. L’ANC est reconnu comme une solution à part entière, alternative à l’assainissement collectif et au moins aussi efficace.

Dans cette perspective et comme évoqué lors du lancement des Assises du BTP en juillet, la CNATP demande que la mise en conformité des Assainissements Non Collectifs (ANC) ainsi que l’installation des systèmes de récupération des eaux de pluie, dès lors que ces travaux soient réalisés par des professionnels qualifiés et assurés, soient une priorité à la hauteur des économies d’énergie.

La CNATP voit dans ces deux domaines, à la fois des opportunités environnementales et de relance du secteur BTP.

La gestion des eaux usées et plus particulièrement l’assainissement autonome.

L’assainissement autonome, également appelé Assainissement Non Collectif (ANC) ou assainissement individuel désigne le traitement des eaux usées (cuisine, salle de bain, WC) pour des habitations qui ne bénéficieraient pas d'un raccord au tout-à-l'égout, lui-même relié à une station d'épuration.

Près de 20 % de la population n’est pas raccordée au réseau public de collecte des eaux usées et doit être équipée de ce type d’assainissements particulièrement adaptés en zone d’habitat dispersé dès lors que celles-ci soient en conformité.

Cependant sur 5 millions d’installations en France, 80 % s’avèrent non conformes.

L'article L271-4 du code de la construction et de l'habitation impose, en cas de vente de tout ou partie d'un immeuble bâti, une série de diagnostics fournie par le vendeur, annexée à la promesse de vente, ou, à défaut de promesse, à l'acte authentique dont le contrôle de l’installation de l’assainissement non collectif.

En cas de non-conformité pouvant affecter la salubrité collective publique relevée par le Service Public d'Assainissement Non Collectif (SPANC), seul compétent pour exercer le contrôle réglementaire des installations d’ANC, l’acquéreur doit réaliser, dans un délai d’un an les travaux de mise en conformité.

À ce titre, les notaires sollicitent très régulièrement nos entreprises afin de réaliser des estimations financières de ces travaux dans le but d’informer les parties avant signature de l’acte de vente.

La réalité est bien différente :

- Les acquéreurs négocient le prix de vente du bien en s’appuyant sur ces devis mais ne réalisent que très rarement les travaux ; en effet, aucun contrôle n’est réalisé,

- Les maires, chargés de la police de l’eau, ne souhaitent pas imposer ces travaux à leurs administrés, les installations non conformes continuent de polluer.

Ces situations sont très courantes dans les zones rurales et exaspèrent tous les acteurs de l’ANC.

S’il faut saluer les incitations consenties comme la TVA au taux intermédiaire, l’ECOPTZ ou encore les différentes aides des agences de l’eau, force est de constater que cela ne suffit pas pour améliorer la situation de l’assainissement autonome.

Nous vous proposons une solution simple, n’engageant pas de dépenses supplémentaires pour l’État et qui permettrait avant tout de garantir une amélioration notable des restes d’effluents dans les sols.

Lors de la vente d’un bien immobilier présentant des non-conformités sur l’ANC, la somme des travaux chiffrés (négociée entre les parties) devrait être consignée par le notaire en charge de la vente. Celui-ci veillerait au déblocage des sommes à la suite des travaux réalisés dans un délai d’un an, conformément à la loi. Cette solution est couramment utilisée dans de nombreux autres actes.

L’application simple et stricte de la loi en vigueur impliquerait :

- Sur le volet environnement et santé publique : une amélioration notable du traitement des rejets d’effluents sur, à terme, 4 millions d’installations non conformes.

- Sur le volet responsabilité des élus locaux : un allègement de leurs contraintes administratives déjà considérables et une limitation des velléités des administrés envers leurs pouvoirs de police de l’assainissement. Ces sommes négociées lors de l’acte de vente seraient ainsi réellement affectées à la rénovation des ANC.

- Sur le volet de l’emploi : la rénovation des ANC polluants réalisée exclusivement par des entreprises de proximité, l’augmentation du volume de travaux permettrait de conserver l’emploi voir dans créer dans les territoires ruraux.

Il serait également souhaitable qu’un document Cerfa soit créé dans le cadre de l'Assainissement Non Collectif afin d’harmoniser les différents documents mis en place sur le territoire.

Enfin, sans doute faudrait-il également envisager un soutien dans ce domaine à tout le moins pour les propriétaires à revenu modeste.

La gestion des eaux pluviales à la parcelle.

Les périodes longues de sécheresse se multiplient et les pluies subites et nombreuses sont fréquentes ; ainsi, la récupération de l’eau de pluie durant ces périodes de chutes d’eau abondantes permet de limiter les ruissellements importants et mieux gérer les périodes de sécheresse qui suivent.

Pour lutter contre le phénomène de ruissellement, la maitrise des eaux pluviales vise aujourd’hui à privilégier une gestion de proximité qui se traduit par des principes fondamentaux :

- gérer l’eau de pluie le plus près du point où elle touche le sol : gestion à la source ou à la parcelle,

- limiter le ruissellement des eaux pluviales : flux, vitesse, volume, distance parcourue…

- maitriser les pics de pluviométrie et diminuer la quantité d’eau rejetée au réseau,

- réduire les surfaces imperméabilisées ou compenser les effets de l’imperméabilisation : végétalisation des espaces, revêtements drainants…

- stocker temporairement les eaux pluviales pour écrêter les flux,

- favoriser l’infiltration naturelle in situ pour recharger les nappes phréatiques.

- développer le végétal dans le cycle de l’eau afin de favoriser l’évaporation de l’eau et l’évapotranspiration par la végétation : toitures terrasses végétalisés…

L’objectif n’est donc plus désormais d’évacuer les eaux de pluie le plus loin et le plus vite possible via un réseau d’assainissement, mais de gérer les volumes d’eau à la parcelle, grâce à des ouvrages de stockage, de rétention associée à un rejet calibré ou encore d’infiltration dans le milieu naturel.

La régulation des eaux pluviales à la source permet aussi de lutter contre les débordements des réseaux d’assainissement, de réduire les risques d’inondation de l’espace urbain et de pollution du milieu naturel.

Il semble aujourd’hui primordial pour l’environnement que cette problématique soit prise en compte :

En incitant au stockage, à la rétention ou à l’infiltration de ces eaux pluviales dans l’habitat existant

En l’intégrant systématiquement dans toutes les constructions neuves, à tout le moins la rétention d’eau.

Nous nous tenons à votre disposition et souhaiterions vous rencontrer pour évoquer plus précisément ces sujets.

Vous pouvez compter sur notre soutien et notre collaboration.

Veuillez agréer, Madame la Première Ministre, l'expression de notre très haute considération.

                                                                  Françoise DESPRET

                                                                  Présidente

 

Autres destinataires :

- Monsieur Christophe BÉCHU, Ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires

- Madame Bérangère COUILLARD, Ministre délégué auprès du Ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires chargée de l’Écologie

                                                                        


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